Diplômée Notaire, Maud Velter s’est spécialisée dans la location meublée et saisonnière
Cécile Duflot, ministre du logement, a présenté le 2 mai dernier en Conseil des ministres, le premier volet de son projet de loi. Celui-ci doit permettre d'édifier 500 000 nouveaux logements par an d'ici 2017. Le deuxième volet qui devrait être présenté avant l'été portera notamment sur les rapports entre bailleurs et locataires. En quoi certaines des mesures vont impacter le marché de la location meublée ? Etats des lieux des risques et des éventuels bénéfices à venir.
Le deuxième volet du projet de loi souhaite remanier la loi du 6 juillet 1989 sur les rapports locatifs (bailleurs/locataires) et va vraisemblablement intégrer des articles sur la location meublée. Avec un parc locatif privé en France de près de six millions de logements, de nombreux propriétaires et locataires sont donc concernés.
L’utilité de la location meublée étant aujourd'hui reconnue, il est projeté de lui donner une définition légale, définition qui ne fera que reprendre celle dégagée ces dernières années par la jurisprudence.
Intégration des locations meublées à la loi du 6 juillet 1989 : des dispositions contractuelles plus rigides ?
La location meublée pourrait être soumise à un certain nombre de dispositions de la loi du 6 juillet 1989 relative aux locations vides.
Certaines dispositions sont déjà applicables notamment l'obligation pour le bailleur de louer un logement décent en bon état d'usage, d'entretien et de réparation ou encore l'obligation de fournir un dossier de diagnostic technique.
Étendre l'application de la plupart des dispositions de la loi du 6 juillet 1989 à la location meublée peut sembler positif mais certaines de ces dispositions non seulement ne présentent pas d'intérêt, mais risquent d'être un frein pour les bailleurs, entraînant une limitation de l'offre locative meublée pourtant indispensable aujourd'hui. A titre d'exemple, la surface habitable est une information rarement demandée par un locataire en meublé. Celui-ci recherche avant tout un logement parfaitement équipé, fonctionnel et bien localisé, et non des mètres carrés. Il serait plus pertinent d'imposer une présentation complète du mobilier et des équipements mis à disposition du locataire.
Quant à la rémunération des professionnels de l'immobilier, deux options sont envisagées : soit un partage des honoraires entre bailleur et locataire, soit des honoraires uniquement à la charge du bailleur. Cette dernière solution présente des risques. En effet, si aujourd’hui les agences mettent tout en œuvre pour offrir aux locataires une prestation de qualité, qu'en sera-t-il demain si le bailleur supporte seul les honoraires ? On peut s'attendre à une diminution de la qualité de service rendu au locataire.
Enfin, des dispositions pourraient rester spécifiques à la location meublée, comme le montant du dépôt de garantie demandé au locataire qui serait limité à deux mois de loyer, contre un dans le cadre d'une location vide. Cela est tout à fait justifié, le dépôt de garantie servant également à couvrir les dégradations éventuelles du mobilier et des équipements fournis avec le logement. Cette disposition entérinerait la pratique des professionnels de la location meublée.
Une perte de flexibilité pour les propriétaires des locations meublées à titre de résidence principale
Aujourd’hui dans le cadre d’une location meublée à titre de résidence principale, bailleur et locataire s’engagent sur un contrat d’un an qui se renouvèle tacitement par période d'un an. Le locataire peut donner congé à tout moment avec un préavis d’un mois. Quant au bailleur, il peut donner congé à chaque date anniversaire avec un préavis de trois mois en motivant celui-ci (vente du bien, reprise pour y habiter ou non respect par le locataire de ses obligations).
Le deuxième volet de la loi Duflot pourrait proposer qu'après deux ans de location meublée à titre de résidence principale par un même locataire, la totalité des dispositions de la loi de 1989 s'appliquent. Or, en pratique, on constate que les locataires restent rarement plus de deux ans dans un appartement meublé, ce mode de location répondant à un besoin temporaire. De prime abord, on peut donc penser que cette disposition ne trouvera que rarement à s'appliquer. Cependant, elle risque d'effrayer les propriétaires ayant besoin de flexibilité et souhaitant récupérer leur bien à court ou moyen terme. Cette mesure portera atteinte à la fluidité du marché et entrainera une diminution du nombre de contrats de location meublée à titre de résidence principale du locataire. Il faudrait prendre en compte la situation du locataire et être à l'écoute de ses besoins. A vouloir le protéger davantage, la loi va finalement le desservir.
Étendre le décret d’encadrement des loyers : un impact sur la location meublée ?
La location meublée n’est pas soumise à l’encadrement des loyers aujourd’hui mais le sera certainement demain. Cela n'aura pas d'incidence sur les prix du marché car, comme le démontrent les derniers baromètres réalisés par Lodgis, l'évolution des loyers du meublé est moindre que celle de l'IRL. Cependant en pratique les propriétaires vont se sentir contraints et ceux qui recherchent la flexibilité préféreront laisser leur bien vacant. Il existe là encore un risque de voir l'offre locative se réduire de façon significative, au détriment des locataires à la recherche d'une location meublée.
Quel avenir pour la GURL (Garantie Universelle des Risques Locatifs) ?
Nous constatons un échec important de la GRL (Garantie des Risques Locatifs). Cette assurance permet au propriétaire de se prémunir contre certains risques liés à la location, notamment les impayés de loyers. La condition pour en bénéficier est que le locataire ait des ressources au moins égales au double du montant du loyer charges comprises. Malheureusement, dans les faits cela s'avère insuffisant. En conséquence le nombre de sinistres est important et le coût de cette garantie n'a cessé d'augmenter.
La GURL (Garantie Universelle des Risques Locatifs) poursuit les mêmes objectifs louables : sécuriser les propriétaires, faciliter l’accès au logement au plus grand nombre et fluidifier le marché locatif. Mais si les conditions d'accès à cette garantie sont similaires à celles de la GRL, la GURL risque de connaître le même échec.
La nécessité d'un cadre juridique adapté pour la location meublée
La mobilité professionnelle et l’évolution des modes de vie génèrent véritablement une demande de locations meublées. En effet d’après le baromètre du 1er trimestre 2013 réalisé par Lodgis, 55% des locations meublées sont destinées à des fins professionnelles. Les entreprises sont de plus en plus à la recherche d’alternatives pour loger temporairement leurs salariés, dans des conditions adaptées, qu’ils soient en déplacement de moyenne ou de longue durée (formations, stages, missions, salons, etc). La location meublée répond aussi aux besoins des étudiants et des personnes en situation d'urgence (séparation, travaux...).
Certaines des réformes envisagées par la future loi Duflot vont encadrer davantage la location meublée mais de manière inadaptée.
Celle-ci a pourtant besoin d'un vrai cadre juridique aujourd'hui, d'un cadre sur mesure pour répondre aux besoins des locataires et non d'une transposition des dispositions de la location vide, qui risquent de dissuader de nombreux propriétaires de louer leur bien meublé. Dans l’ensemble, aucune des mesures prévues ne favorisera la location, qu'elle soit vide ou meublée. Les locataires, que l'on souhaite protéger, risquent au final d'être perdants...
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